L’Atelier des Filles du Faso, à Ouagadougou, nous avons enfin un lieu d’accueil pour réunir les femmes qui crochètent
Rencontre avec Delphine Kohler, Présidente de l’Association LES FILLES DU FACTEUR et Jacqueline Husetowski-Danguin un après-midi de Septembre 2011 à Montreuil.
Lorsque j’ai découvert l’existence des Filles du Facteur, je fus très impressionnée par la capacité de ces femmes, à oser utiliser des sacs plastiques récupérés, traités, et découpés en lanières, telles des pelotes de laines. Elles ont appris à crocheter, à démultiplier ce savoir au plus grand nombre. Grâce à ce crochet et aux sacs plastiques récupérés, leur existence a pris un nouvel essor. Et en France, du côté des grands couturiers elles ont maintenant leur empreinte. J’ai eu le souhait de rencontrer Delphine Kolher, Présidente de l’Association des filles du Facteur » afin de faire découvrir dans notre newsletter, cette aventure innovante.
« Il faut que je vous dise la 1ère fois où j’ai lu « les filles du facteur » j’ai pensé à un facteur qui apportait des informations variées, en distribuant le courrier aux femmes africaines »
C’est un petit peu ça aussi, car le FACTEUR CELESTE a plusieurs sens, c’est vrai que ce sont les bonnes nouvelles du courrier, et c’est aussi « fabriquer » comme les facteurs d’orgues, d’instruments de musique…Au départ j’avais choisi la marque, « FACTEUR CELESTE» dans le but de fabriquer des objets avec une éthique de développement durable, d’échanges de cultures, d’artisanats de faits main, avec un fabricant d’espadrilles situé au pays basque. Nous fabriquions des tongs japonaises au pays basque !! Simplement pour différentes raisons nous avons arrêté en 2000, et avec les personnes qui m’ont soutenue nous avons décidé de poursuivre en gardant la marque « facteur céleste » sous une forme associative. Cette aventure a continué en Afrique au Burkina Faso, pays où je suis retournée après 30 ans et j’ai décidé d’y faire un break volontaire.
Et de nouveaux projets ont pris naissance autour du recyclage. Déjà dans le lieu de facteur céleste il y avait des ateliers de récupération, on valorisait les objets faits à la main. J’avais été très séduite avant mon « retour en Afrique » par les objets fabriqués au Maroc et au Brésil, avec des sacs plastiques récupérés et crochetés. J’avais donc crée en France des ateliers d’objets-sacs plastique et naturellement je les ai poursuivis au Burkina Faso. J’ai donné du travail à des femmes en précarité, parfois handicapées en Afrique ; ainsi, elles aussi prenaient conscience des déchets qui polluent l’environnement.
Comment ces femmes ont-elles réagi pour utiliser le crochet qu’elles ne connaissaient pas ? Ont-elles appris ensemble ?
Faire du crochet est bien plus facile qu’on ne le pense, je peux, vraiment en 5 minutes apprendre ses bases et on commence à créer. C’est l’apprentissage d’un métier à la portée de tous, enfants, adultes. Dans les villages retirés, en Afrique, les femmes se regroupent, crochètent, se parlent, d’autres viennent voir et s’y mettent aussi. C’est donc, la combinaison d’un outil abordable, le crochet ne coûte pas cher, et l’utilisation d’une matière première gratuite le sac plastique qui participe au recyclage.
Justement comment cela se passe-t-il pour le recyclage de la matière première ?
Au Burkina il n’y a pas de poubelles, les sacs sont jetés n’importe où et, ceux qui les ramassent -des enfants, des adultes-, les vendent à des recycleurs qui les lavent, et qui à leur tour, les revendent à des femmes qui vont les transformer. Ceux qui sont déchirés, peuvent être fondus pour faire de la matière qui permet de créer du mobilier. Les autres sont découpés en lanières d’une certaine façon.
Elles possèdent beaucoup d’inventivité pour parvenir à ces différentes utilisations ?
Ah ! oui et ensemble elles partagent leur idées.
Ces femmes me semblent-il, se sont regroupées en coopérative ?
Il existait déjà au Burkina Faso un groupe de femmes qui faisaient du tissage, coton & plastique recyclés. Nous sommes en relation avec ces femmes, et nous sommes heureuses d’avoir pu l’année dernière présenter ce matériau chez Yves St Laurent, qui l’a sélectionnée pour un de ces modèles de sacs« le Muse Artisanal».Il a fallu une année pour que ces femmes qui crochètent parviennent à se perfectionner jusqu’à atteindre le niveau demandé. C’est à présent chose faite. Cette année nous attendons d’YSL la commande pour un sac Muse fabriqué au crochet, qui impliquerait, contrairement au tissage, un plus grand nombre de femmes. Ce projet est surtout innovant, car il mobilise la capacité créative de chaque femme, ce qui pour elle et hautement valorisant.Etre solidaire, c’est pérenniser les projets, nous verrons si le monde du luxe va choisir de s’y engager.
Est-ce qu’en Afrique, ces femmes bénéficient de la vente de leurs objets ?
Le problème en Afrique c’est que les femmes qui créaient les objets, n’ont pas le lien que nous possédons avec la mode, les débouchés, car nous, « filles du facteur » nous pouvons emmener des clients comme Monoprix, et Yves Saint Laurent. Les organismes qui existent là-bas, peuvent créer des choses, mais qui ne sont pas « achetables, à la mode de chez nous » les cultures sont différentes.
Comment gèrent-elles l’argent de la vente de leurs objet ?
A la base ce sont des femmes qui n’ont rien. Elles ont donc, une vie plus confortable, leurs enfants peuvent fréquenter l’école, ce qui est une « victoire » elles peuvent mettre de l’argent de côté pour elles. On leur achète le travail, on leur montre comment travailler ensemble, elles ont aujourd’hui un atelier où elles aiment se réunir plutôt que travailler seules chez elles.
Pour mieux les connaître, être séduites, leur acheter leurs objets en cette période propice :