C’est une question que l’on pose fréquemment aux membres de Créa-france. Elle n’est pas nouvelle, mais elle est devenue concrète et urgente. Elle s’appuie sur le constat que dans de nombreux domaines, l’innovation est une des clés majeures du succès des entreprises car génératrice de valeur ajoutée économique, sociale et environnementale. Les vedettes dans le domaine sont actuellement Google et Apple, mais n’oublions pas 3M, General Electric, Proctor & Gamble et bien d’autres, ainsi que des civilisations entières qui ont été dominantes car en rupture sur les autres le long des siècles – Les Chinois, les Arabo-Musulmans, Venise, le Portugal… Il y a beaucoup à apprendre en étudiant et en s’inspirant ce qui a fait leur succès.

Pourquoi poser cette question aux membres de Créa-france ? Ils ont souvent une longueur d’avance sur la réflexion et la pratique puisqu’il s’agit d’un groupe très varié de spécialistes qui dialoguent depuis plus de six ans à propos des diverses formes de la pensée créative et des moyens de développer celle-ci. Certains s’intéressent particulièrement à l’apport de la pensée créative appliquée aux projets d’innovation et aux cultures des organisations. Je fais partie de ceux-là et c’est dans cette optique que je propose quelques définitions pour de futurs échanges au sein de Créa-France et avec les nombreux interlocuteurs de notre association qui sont Créa-Université, CREA en Italie, European Association for Creativity and Innovation, Creative Education Foundation (faites un tour du monde sur www.ifoco.com !).

Depuis les travaux d’Henri Poincaré, d’Alex Osborn, de Sidney Parnes, de Paul Torrance, de Guy Aznar et de Luc de Brabandère pour citer des sources aisément accessibles, nous comprenons comment fonctionne le processus créatif individuel et comment celui-ci vient considérablement enrichir les projets d’innovation. Grâce à eux et aux nombreux praticiens sur le terrain, l’apport de l’imagination et de l’intuition est aujourd’hui largement reconnu. Un chercheur scientifique, un ingénieur, un architecte nous dirait qu’en explorant son sujet il a parfois des intuitions qu’il met ensuite longtemps à démontrer en utilisant la pensée rationnelle. Einstein a eu l’intuition de la théorie de la relativité à seize ans lors d’un voyage imaginaire dans l’espace, puis il a mis dix ans à acquérir les outils mathématiques qui lui ont permis de démontrer cette intuition.

L’innovation dont il est question ne concerne pas seulement des produits et des services, mais aussi le leadership, les stratégies, les structures, l’organisation, les méthodes de travail, l’animation des équipes, et l’amélioration au quotidien à tous les niveaux. Elle se déploie dans les entreprises et dans les organisations responsables du social, de la santé et de l’éducation.

Alors, comment repérer, valoriser et orchestrer la créativité individuelle dans un contexte de projets collectifs pour favoriser l’innovation au sein d’une organisation afin que celle-ci crée de la valeur ? En agissant simultanément et de manière cohérente sur toutes les composantes d’une culture dont la définition peut être : l’agencement propre de valeurs, d’attitudes, de comportements, de structures, de méthodes et de communications.

Concrètement, cela se traduit par :

  • Une réflexion des dirigeants sur leur propre définition de l’innovation dans le cadre de leur organisation et de son environnement économique, social et écologique, sur le lien entre l’innovation et les valeurs de l’organisation, sur une stratégie, sur des objectifs, et sur des moyens
  • La communication interne sur ces éléments et la mise à disposition des moyens comme par exemple, des méthodes, des ressources, de la formation, de l’information
  • Appropriation de ces éléments à tous les niveaux de l’organisation et adaptation aux différents métiers et rôles – cette appropriation suppose une animation de groupes de réflexion et une remontée d’informations qui nourrit à son tour la réflexion des dirigeants
  • La coordination des projets innovants, des échanges transversaux, des plans d’actions
  • La communication des résultats des actions, pour que l’expérience de chacun serve à tous
  • La célébration des succès !

Vaste programme ! En effet, il ne suffit pas de communiquer des objectifs, de former quelques spécialistes, d’acheter une start up… c’est tout un terrain à défricher, à labourer en profondeur et à cultiver pour que l’innovation prenne racine et porte durablement ses fruits. Par ailleurs, dans une entreprise où règne une cohérence sur le sujet de l’innovation, des actions d’accompagnement de projets et de développement des talents peuvent servir d’accélérateur de résultats.

Olwen WOLFE

Directrice de Worlding. Auteur de J!innove comme on respire, premier livre de référence sur la méthode Creative Problem Solving pour un public francophone en Europe.